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24 septembre 2020

Portraits Institut Mines-Télécom Business School - Portrait de Laurent Cabassu (IMT-BS 2004), Directeur Général Europe de l'Ouest chez Pirelli et Président du CA Aliapur

Quel est ton parcours scolaire avant IMT-BS ?

Je suis de Marseille où j’ai fait une première année de prépa HEC, suite à cette première année j’ai intégré une prépa Normale, un parcours à cheval entre fac et prépa qui me plaisait bien. C’était un concours parallèle qui permettait d’intégrer en 1ère année les meilleures écoles de commerce comme l’INT (devenue IMT-BS) avec un nombre limité de places.

Pourquoi as-tu choisi IMT-BS ?

2 choses, 

1 - A l’époque on était vraiment à l'explosion d'internet, IMT-BS était reconnue pour être une des meilleures écoles dans le domaine des technologies de l’internet et des télécoms. C’était hyper stimulant d’avoir cette culture ingénieur et manager.

2 - Je venais d’un double cursus prépa fac que j’avais beaucoup apprécié et il y avait le double cursus avec Dauphine quand je suis arrivé à l’école. Cela m'a permis de continuer de faire un parcours ESC spécialisé dans les technos et en parallèle de continuer un parcours à la fac en Maîtrise de sciences de gestion. Je suis donc sorti de l’école avec un double diplôme bac +4 à Dauphine et un diplôme Grande Ecole bac +5 de IMT-BS.

Ce que l'école t'a apportée ?

Cette double culture ingénieur et manager. Nous étions tellement mélangés, nous apprenions tellement les uns des autres. Finalement aujourd'hui nos parcours se rejoignent, les ingénieurs restent un peu plus tech mais nous avons des parcours croisés. On reste des profils différents, mais on se retrouve tous dans le monde professionnel et c’est vraiment bien. 

Bien sûr j’ai beaucoup apprécié le côté campus, j’ai beaucoup profité du sport et des fêtes de l’école. Je ne rentrais pas souvent à Marseille, et comme beaucoup d’étudiants, nous passions beaucoup de week-ends ensemble entre Evry et Paris. Le côté proximité de Paris quand on vient de province c’est très agréable. 

Côté études, j’ai adoré l’idée du double diplôme et ma majeure en Stratégie en alternance avec Thierry Isckia faite après mon année de césure. C’était une très bonne transition entre l’école et l’entreprise. C’était concret. Ma formation était large et je me suis orienté plus vers le marketing et la vente.

Étais-tu membre d'une association du campus ?

J’étais membre actif chez Dolph’int et j'étais aussi dans l'équipe de foot. 

Passionné de voile depuis mon enfance j’ai pu avec Dolph’int participer à 2 Tours de France à la voile, l’Edhec, la coupe de France... 

C’était une expérience humaine exceptionnelle, le coté projet était sympa, stimulant, avec la recherche de sponsors mais surtout ce mois de course, une épreuve géniale, une expérience incroyable, difficile, il faut être solidaire et débrouillard. Nous étions une bonne vingtaine d’élèves. Nous avons gardé le lien et continuons de nous voir quelques fois pour naviguer.

Est-ce que tu continues de pratiquer la voile et/ou le football ? D’ailleurs en tant que marseillais tu devais être content que l’OM est gagnée contre le PSG récemment ?

Oui j’étais plutôt content (rires). Lorsque j’avais 14 ans, Marseille a gagné la coupe d’Europe depuis j’ai le virus dans une moindre mesure, c’est encore un lien que j’ai avec les anciens de l’école, cela chambre pas mal sur WhatsApp au moment des matchs. C’est assez marrant, c’est un lien qu’on garde même si on ne s’est pas vu depuis des années. 

On organise notre tournoi de l’été chaque année avec les anciens de l’école avec femmes, enfants autour d’un pique-nique. C’est un lien qui reste. Mes enfants étant en Italie, le football est incontournable maintenant, mes garçons, ma fille, tout le monde soutien les équipes et jouent avec plaisir. 

La voile je pratique moins, c'est plus difficile avec les enfants en bas âge mais dès que nous avons une occasion nous y allons. 

Aujourd'hui tu es DG de Pirelli, cela fait 18 ans maintenant que tu travailles pour cette entreprise, peux-tu nous raconter un peu ton parcours au sein de Pirelli ?

J’ai fait une année de césure, j’ai cherché mon stage un peu au dernier moment et Pirelli m'a fait une proposition dans un délai record. Au départ, je n’avais pas d’affinité avec l’automobile et finalement 18 ans après j’y suis encore. C’était une opportunité à l’époque qui est devenue une passion.  

Je m’occupais dans un premier temps du e-commerce en BtoB, et petit à petit j’ai élargi mon scope car mon maître de stage est parti sans remplacement. Grâce à cela au bout de 2 ans (fin de ma césure et de ma 3ème année d’apprentissage) on m’a embauché au Marketing Trade and Consumer, je m’occupais des newsletters, de la génération de trafic sur le site internet mais aussi des promotions à destination des consommateurs finaux. 

Rapidement on m’a proposé d’aller au commerce, cela a été une expérience très complémentaire après mon parcours au marketing, j’étais responsable Grand Comptes, pendant 4 ans. 

Ayant toujours voulu partir à l’étranger j’ai construit mon parcours avec Pirelli qui m’a donné l'opportunité de faire une expérience à Milan au siège, ce qui m’a permis d’apprendre l’Italien mais aussi de voir que Pirelli en France c’est une centaine de personnes mais 35 000 dans le monde. A Milan, j’étais immergé au sein du siège qui compte 2000 personnes. Cette opportunité m’a permis de me faire connaître. Au bout de quelques mois ils m’ont donné la direction du marketing en France, au bout d’un an j’ai pris la direction commerciale, puis 4 ans après j’ai pris la Direction Générale de la France. J’avais 33 ans, j’étais le plus jeune Directeur Général du groupe, c'était une expérience incroyable. Je suis resté à ce poste durant 4 ans. J’ai d’ailleurs développée l’équipe de vente France composée à 30% de femmes, encore à ce jour la seule équipe réellement mixte en Europe avec une des meilleures performances. Puis je suis parti un an en Australie comme Directeur Général de la région Pacifique- Australie, et Pirelli m’a demandé de rentrer pour prendre la direction marketing monde du groupe, basée à Milan durant 2 ans, puis la direction commerciale de l’Europe avec près d’1 milliard de CA à gérer. Cette année le groupe a changé d’organisation. Pirelli voulait des équipes plus proches des marchés et ils m’ont demandé de rentrer à Paris pour prendre la direction de 5 pays, je suis donc Directeur Général de l’Europe de l’Ouest. Je m’occupe de la France, Bénélux, Portugal et Espagne.

Beaucoup de changements de poste durant 18 ans, de nombreux déplacements, ton organisation personnelle n’a pas été trop impactée ? 

 J’ai toujours voyagé, dans la vente c’est incontournable. Il est vrai que c’est une organisation pour toute ma famille comme pour l’Australie où j’ai vécu 11 mois et ma femme et mes 3 enfants 8 mois pour revenir en Europe. Aujourd’hui ma femme travaille à Milan et moi à Paris, je suis donc à cheval sur les 2 pays. Ce n’est pas simple d’être loin de sa famille, je dois dire que la Covid nous a permis de nous voir plus. 

Quel impact économique la Covid a eu sur Pirelli ?

Un impact économique important car si on doit résumer notre activité à 2 KPI :

  • les ventes de voitures neuves, équipement des voitures en sortie d’usine
  • le nombre de km parcourus par les véhicules

Pendant la période Covid il n’y a pas eu de production ou vente de voitures neuves, peu de récupération sur cette partie. De plus les gens n’ont pas circulé, cela a entraîné une baisse de nos ventes de 95% du jour au lendemain.

D’un autre côté, nous avons 2 activités complémentaires :

  • Pneus de vélo très tendance en ce moment
  • Pneus de scooter/moto 

L’utilisation des 2 roues a explosé que cela soit en vente ou en entretien notamment par le fait que de nombreuses personnes souhaitent éviter l’usage des transports en commun.

Il y a eu un rattrapage de nos ventes post-Covid énorme.

De plus, pendant les vacances d’été les français ont consommé autant d’essence que les vacanciers français plus étrangers en 2019. Cette année il n’y avait presque que les français sur le territoire qui ont beaucoup utilisé leur véhicule, nous avons eu un retour de l’activité important avec la remise en état des véhicules avant le départ, pas mal de km impliquant un changement de pneus pour d’autres au retour. Le redémarrage était assez violent. Nous n’étions pas préparés à cela, il a fallu mettre nos usines en ordre de marche, pas facile à faire, nous n’avions pas anticipé. 

Maintenant il faut voir dans quelle mesure cela va durer, nous pensons que cet impact conjoncturel ne va pas durer. En France, la voiture est beaucoup utilisée pour faire le trajet quotidien maison-école-travail. Mais le télétravail va faire que les gens feront beaucoup moins de km au quotidien, c’est pour nous le vrai point d’interrogation. 

Quels sont les enjeux stratégiques – les défis de Pirelli aujourd’hui ? 

Nous sommes des industriels, notre défi va être d’accompagner chaque marché en fonction de sa vitesse de redémarrage. Les estimations ne sont pas claires, quand va-t-on revenir à la normale ? Nous avons des usines avec un peu moins de 30 000 ouvriers qui y travaillent, nous devons les faire tourner à la bonne vitesse, ce n’est pas simple et nous sommes confrontés à beaucoup d’incertitudes. C’est difficile à gérer entre le moment où on produit notre pneu dans une usine et le moment où le produit arrive sur le marché il peut y avoir un délai de plusieurs semaines, on peut créer de la rupture mais pour le consommateur il ne peut y avoir de délai. Si vous n’avez pas les pneus en magasins vous vous reportez sur une autre marque. Le vrai enjeu de savoir si le marché va revenir à un volume « avant COVID » et si oui, combien de temps cela va-t-il prendre ? Quel va être l’impact de tous les changements en termes d’organisation (télétravail), de model de mobilité, et quel va être l’impact sur notre manufacture ?

Comment la Covid a impacté l'organisation de tes équipes ?

Avec la Covid le groupe a instauré un télétravail intensif. Actuellement nous sommes le lundi, mardi et mercredi en présentiel et le jeudi et vendredi en télétravail. Donc pour moi en Italie afin d’être avec ma famille. selon les pays il y’a plus ou moins de télétravail en fonction de la situation sanitaire.

Nous avions commencé à mettre en place le télétravail avant la crise sanitaire. Aujourd’hui les choses se sont accélérées mais cela restera de manière structurelle, on est entrain de revoir notre accord en France car il faut le formaliser ; on va donc le systématiser avec du présentiel et du télétravail en 2 ou 3 jours. C’est très positif, les salariés le perçoivent de manière très positive. Le work and life balance est totalement revisité grâce à ce changement et c’est très bien. Mais le présentiel reste indispensable. Le lien social entre les équipes et collaborateurs est extrêmement important c’est pour cela que nous avons mis des jours fixes pour le présentiel pour que tous se voient malgré les masques et les distances. Cela permet les échanges informels autour d’un café qui fait partie prenante de la vie en entreprise, de la créativité et du lien entre les personnes. Le distanciel est beaucoup plus dans la planification et moins dans la spontanéité, donc moins d’échanges informels ce qui est dommageable. D’où cet équilibre et ces jours fixes, une solution idéale pour les équipes.

Quelle importance le réseau IMT-BS a eu avant et pendant ta carrière ? 

J’ai gardé de nombreux liens avec ma promo, mais aussi celle d’après et ceux rencontrés dans les associations. Nous nous revoyons de temps en temps car beaucoup sont restés dans la région parisienne. Le réseau est très important, par exemple quand je suis parti à Sydney, j’ai eu un super contact avec un pote de promo IMT-BS, pas vu pendant 15 ans, qui m’a beaucoup aidé pour mon installation puis celle de ma femme et de mes enfants. 

On avait monté une équipe de foot avec les copains de promo qui existe encore d’ailleurs. Et le lien est maintenu, encore la semaine dernière je déjeunais avec l’un d’entre eux. 

Le réseau est important pour sa carrière mais aussi à titre personnel comme pour Sydney par exemple. Il ne faut pas le négliger.

Tu es également un donateur IMT-BS (en faveur de l'égalité des chances - valeur chère de l'école), peux-tu nous en dire plus sur cet engagement ?

L’égalité des chances est pour moi un vrai sujet, c’est spontané. J’ai grandi à Marseille, ville cosmopolite, pour moi c’est naturel. Je sais que les études ont un coût, et cela ne se résume pas aux frais d’inscription. J’ai confiance dans le projet auquel je participe, je suis convaincu de son utilité et conscient de son importance. J’ai l’opportunité et la possibilité d’aider les futures générations donc je le fais. Et je vais continuer. 

Propos recueillis par Nathalie Schiro  

21 septembre 2020




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