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15 septembre 2021

Portraits Télécom SudParis - Portrait de Loïc Le Gars (TSP 2011), Principal chez ERM : Environmental Resources Management

Haga Randrianaly (IMT-BS, étudiant en deuxième année) à la rencontre de Loïc Le Gars (TSP 2011), Principal chez ERM : Environmental Resources Management


  1. Pouvez-vous vous présenter ?

Après l’obtention de mon diplôme d’ingénieur de Télécom SudParis en 2011, j'ai commencé ma carrière chez un opérateur télécom, avant de décider de me réorienter après seulement 3 ans vers le domaine de la transition énergétique. Le changement climatique était en effet une de mes principales préoccupations. 

A l’époque, la convergence entre les secteurs de l’énergie et de l’IT à travers des concepts tels que les smart grids, les smart cities ou la 3ème révolution industrielle, étaient à la mode. J’ai recherché dans un premier temps à comprendre comment mes compétences d’ingénieur télécom pouvait être mises à profit dans le cadre d’une transition bas carbone.

Mais le monde de l’énergie m’était relativement étranger et j’ai choisi alors de reprendre des études à travers un Master nommé « Alternatives pour l'énergie du futur » enseigné entre l’École des Mines ParisTech et de l’université de Tsinghua à Pékin. Cette formation, au-delà d’apporter une connaissance internationale des marchés de l’énergie, a été l’occasion de visiter de nombreux projets de production d’énergie (de centrales à charbon, à des projets de solaire à concentration, en passant par des chantiers de construction de centrales nucléaire de 3ème génération). J’ai finalisé ce cursus en travaillant en tant qu’ingénieur de recherche pour l’ADEME sur les premiers scénarios 100% électricité renouvelable pour la France. Cette étude a démontré la faisabilité théorique et calculé le coût d’un tel mix électrique à horizon 2050.

À l'issue de ce projet, j’ai rejoint en 2015 Enea, un cabinet de conseil en stratégie spécialisé sur les enjeux de la transition énergétique, qui comprend une centaine de consultants basés à Paris et en APAC. Aujourd’hui, je poursuis cette même activité de conseil au sein d’ERM (Environmental Resources Management), basé à Londres. 

Mes missions ont pour objectif d’aider les pouvoirs publics et des entreprises à estimer le potentiel de nouvelles technologies du secteur de l’énergie, décrypter les évolutions des marchés et les accompagner à se positionner dessus. Les sujets sont aussi bien liés à la production d’énergie renouvelable (ex : éolien offshore), le stockage d’énergie (ex : Power-to-X), son transport international (ex : sous forme d’ammoniac), sa distribution nationale (ex : pipelines d’hydrogène), l’efficacité énergétique (ex : dans l’industrie) ou encore l’accès à l’énergie dans des pays peu électrifiés (ex : mini-grids). Les études font appel à la fois à la modélisation de scénarios et de systèmes énergétiques, à des analyses économiques, environnementales, règlementaires, et enfin demandent des compétences en stratégie d’entreprise ou en politique publique pour conseiller les clients finaux. 

Au cours des années, je me suis spécialisé dans le domaine du gaz renouvelable, et notamment l’hydrogène bas carbone, un sujet en vogue ces derniers mois. 

 

  1. Au cours de votre carrière, vous avez évolué dans les secteurs des télécoms et de l’énergie et à des postes tels que le management de projets, la R&D ou le conseil. Quelles étaient vos motivations lors de chaque changement d’activité ? Quel était le dénominateur commun à l’ensemble de ces secteurs ?

Il y a probablement deux principales raisons : la volonté de participer aux changements de société et travailler sur des technologies innovantes. Les technologies de l’information ont grandement façonné la société actuelle et ont motivé mon choix d’intégrer à l’époque Telecom SudParis. Le changement climatique représente surement le plus grand défi du siècle. J’ai effectué mes premières années dans les départements innovation d’opérateurs télécoms. Aujourd’hui, mon travail consiste en grande partie à estimer le potentiel de nouvelles technologies du secteur de l’énergie.


  1. Vous travaillez actuellement sur la transition énergétique, pourquoi cet attrait pour les énergies renouvelables ?

Les énergies renouvelables, comme le nucléaire, peuvent être des solutions pour réduire notre empreinte carbone. Mais l’énergie la moins émettrice reste avant tout celle que nous ne consommons pas et à ce titre, les efforts pour augmenter l’efficacité énergétique sont très efficaces pour abattre du CO2. L'efficacité énergétique est un héros méconnu de la transition énergétique qui devrait à mon sens constituer la priorité des entreprises et gouvernements, en parallèle de l’adoption d’énergies bas carbone. Elle permettra au monde de limiter la croissance de sa consommation d’énergie alors même qu’une hausse de la population mondiale à 9,5 milliards d’êtres humains est envisagé d'ici 2050. 

Par ailleurs, le débat sur l’électricité nucléaire en France fait de l’ombre aux efforts à concentrer sur des secteurs plus émetteurs de gaz à effet de serre, tels que les transports (30% des émissions), l’industrie (20%), l’agriculture (20%), contre 10% pour la production et transformation d’énergies en France.

Aussi, il n’y a pas « une » transition énergétique portée par un modèle universel mais « des » transitions énergétiques dont le choix des énergies renouvelables à déployer dépend avant tout des potentiels locaux et régionaux. La diversité des schémas possibles rend le sujet passionnant. 

J’aime travailler sur le développement du gaz renouvelable, tel que l’hydrogène vert ou le biométhane. On comprend bien l’intérêt de produire en France du biométhane bas carbone qui apporte un revenu additionnel au secteur agricole, plutôt que d’importer du gaz naturel (méthane fossile), de Russie ou du Quatar. Les énergies renouvelables, c’est aussi la promesse de réduire la dépendance énergétique des pays et les risques géopolitiques associés. 

Les ingénieurs jouent un rôle primordial dans la transition énergétique. Environ la moitié des technologies dont nous aurons besoin pour résoudre le problème climatique à horizon 2050 (ex : captage et stockage du dioxyde de carbone) n’ont pas atteint le stade commercial. Les ingénieurs télécoms ont aussi leur rôle à jouer. Si on prend l’exemple de l’électrification en zones rurales en Afrique subsaharienne, celle-ci est en grande partie possible grâce à un triptyque : des panneaux solaires à un coût maintenant abordable, couplés à un mécanisme de micro-financement, qui fonctionne grace à la présence d’antennes télécoms (elles-mêmes alimentées par de énergie solaire) et de téléphones mobiles, à travers un business modèle du type Pay-As-You-Go (les clients remboursent chaque jour une partie du kit solaire micro-financé en envoyant un sms qui débite la somme sur leur compte). 

Au-delà de cet exemple, il y a un besoin urgent d’avoir des ingénieurs télécoms compétents sur les questions climatiques pour réduire l’empreinte environnementale du secteur de l’IT.

 

  1. Pouvez-vous nous présenter le déroulement de votre journée en tant que Principal chez ERM : Environmental Resources Management ?

Le monde du conseil emporte son propre jargon hiérarchique et on retrouve généralement 5 principaux niveaux : Analyste ou Associate, Consultant, Manager, Principal, Partner. Le rôle de Principal est en génaral multidisciplinaire, et demande à la fois de superviser des missions, de participer au développement commercial et interne de l’entreprise, et de porter une expertise spécifique. Ces différentes activités ponctuent mes journées de travail. La finalité reste de conseiller des clients. A titre d’exemples, je mène en ce moment une étude pour le gouvernement suisse pour évaluer l’efficacité des politiques de soutien à la réduction des consommations d’énergie dans l’industrie, une autre pour un aciériste qui souhaite évaluer le coût de production d’un acier à plus faible teneur en carbone en utilisant de l’hydrogène vert, et une autre pour un fond d’investissement qui veut évaluer l’opportunité d’investir dans des infrastructures d’export d’énergie solaire sous forme d’ammoniaque vert du Chili vers l’Asie. Les sujets et clients sont variés, mais le dénominateur commun reste la transition énergétique. 


  1. Vous intervenez au sein de l’école des Mines ParisTech en tant que Visiting lecturer. Que vous apporte le domaine de l’enseignement ?

J’anime un cours sur les marchés et l’économie de l'hydrogène. C’est un exercice très intéressant pour prendre du recul sur ses sujets, un travail de synthèse, qui permet aussi de sonder les questions et attentes des étudiants sur la transition énergétique. D’année en année, je me rends compte aussi que les hypothèses changent rapidement. Il était par exemple difficile d’envisager il y a 5 ans que de l’hydrogène vert serait rapidement compétitif et pourrait donc remplacer à prix égal de l’hydrogène gris produit à partir d’énergie fossile. On l’envisage aujourd’hui dans plusieurs pays à horizon 5-10 ans.


  1. Vous êtes adhérent au réseau Intermines. Dans quelle mesure l’appartenance à ce réseau vous a aidé dans votre parcours ? Selon vous, comment le réseau Intermines peut-il être utile aux étudiants et aux diplômés ?

L’École des Mines ParisTech a joué un rôle important dans mes études et l’orientation sectorielle de ma carrière. Il me paraissait donc logique d’adhérer au réseau Intermines, au sein duquel j’ai pu trouver une importante communauté d'ingénieurs en énergie, mais aussi télécom à travers l’institut Mines-Telecom.

Au sein du réseau Intermines, j’ai rejoint le groupe “l’Union Fait la Force!” (UFF), qui est un mouvement d'entraide et de solidarité d’environ 100 personnes qui sont d'accord pour être contactées à tout moment par un autre membre du groupe, en plus d’une rencontre hebdomadaire. Cela permet de rentrer en contact et de nouer des liens avec l’ensemble des membres de l’UFF. Ainsi, j’ai pu bénéficier de conseils et des retours d’expérience de la part des membres expérimentés dans le secteur de l’énergie.

Je conseille fortement aux étudiants ainsi qu’aux alumni de s'intéresser au réseau Intermines afin de bénéficier des conseils et opportunités que ce réseau offre dans le domaine de l’énergie. Les secteurs des technologies du numérique et de la transition énergétique convergent à l’aide de nombreuses passerelles. Le réseau Intermines est ouvert aux étudiants et alumni de Télécom SudParis et IMT-BS.


  1. En période de pandémie, avez-vous un conseil pour les étudiants qui vont entrer sur le marché de l’emploi ?

Malgré la pandémie, le domaine de la transition énergétique a connu une véritable accélération ces derniers mois, notamment sous l’influence du Green Deal européen. C’est un secteur qui recrute en ce moment.

 



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